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Jon Anza: la famille tient le Parquet de Bayonne en suspicion
02/07/2010
Goizeder TABERNA
«Nous sommes devant une série impressionnante d'éléments qui permettent d'être certain que ni les services de police, ni les services judiciaires n'ont correctement fonctionné», a déclaré Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des Droits de l'Homme (LDH), lors d'une conférence de presse réalisée à Paris. Accompagnés par les représentants du Collectif Jon Anza et des membres de la famille de ce militant basque, les avocats Me Xantiana Cachenaut et Me Julien Brel ont annoncé avoir envoyé un courrier à la ministre de la Justice, Michèle Alliot-Marie, pour demander la saisine de l'Inspection générale des services judiciaires.
Une demande d'enquête destinée à faire la lumière sur la procédure dirigée par le Parquet de Bayonne dès la déposition de la plainte de la famille de Jon Anza, le 15 mai 2009. Trois jours plus tard, la procureure de Bayonne Anne Kayanakis lançait les recherches. Or, s'appuyant sur les données de l'enquête préliminaire, Me Brel constate des insuffisances concernant les investigations réalisées à Toulouse.
La procureure se défend
Au lendemain de la déposition de la plainte, «une simple réquisition au bureau des objets trouvés» de la ville «aurait suffi», d'après l'avocat, pour retrouver la trace du militant d'ETA disparu le 18 avril, et retrouvé le 29 avril sans qu'on ait pu l'identifier. Effectivement, le passeport de Jon Anza y avait été déposé par une personne dont, d'ailleurs, le nom n'avait pas été enregistré, comme le relève le président de la LDH. L'avocat de la famille insiste sur le fait que l'hôpital Purpan, dans lequel avait séjourné J. Anza, inconscient, pendant plus de dix jours, «a respecté le protocole» défini dans les cas de personnes non identifiées, mais qu'il n'aurait «jamais reçu de réquisition» du Parquet de Bayonne. Un agent du CHU aurait confirmé à l'avocat qu'il «ne trouve pas trace de ces réquisitions». L'avocat poursuit : «l'enquête s'est arrêtée à Saint-Gaudens».
Selon la procureure de Bayonne Anne Kayanakis, contactée hier à la suite de la conférence de presse, dans le procès-verbal qui recueille la liste des hôpitaux interrogés aucun numéro de fax ni d'adresse n'a été précisé pour les établissements de Bordeaux et de Toulouse ; «ce qui ne veut pas dire qu'ils n'ont pas été réquisitionnés». Un autre PV certifierait que «les diligences ont été faites» auprès des hôpitaux de Toulouse et que les investigations n'ont rien apporté.
Hier, A. Kayanakis n'était pas informée du courrier envoyé par les avocats. Dans le cas où la simple transmission de document ne suffirait pas et que Michèle Alliot-Marie saisissait l'Inspection des services judiciaires, le protocole se mettrait en place. Pour une inspection régulière, la procédure pourrait durer entre quatre et cinq mois. Dans le cas d'une affaire, la durée pourrait être plus courte.
«Une raison d'Etat»
Aujourd'hui, le dossier est entre les mains d'un juge d'instruction toulousain et la famille s'est porté partie civile. Une étape «indispensable» selon Me Cachenaut afin que la famille ait accès au dossier, et surtout, parce que pendant des mois «l'enquête n'a rien donné», alors que 12 jours après la disparition du militant basque l'affaire aurait pu être résolue.
La famille ne croit pas dans la thèse des dysfonctionnements ; «toute l'enquête en souffre». Ce qui «amène à penser qu'une raison d'Etat justifierait cela». Les avocats ont constaté que les enquêteurs ont beaucoup cherché dans la direction des compagnies aériennes, laissant penser qu'ils travaillaient dans le sens de la thèse de la fuite de Jon Anza, défendue par le ministre espagnol A. P. Rubalcaba et relayée par M. Alliot-Marie. Cependant, au regard de l'oubli d'armes dans un hôtel toulousain par des gardes civils espagnols pendant la période des faits, Me Cachenaut affirme : «aucune hypothèse ne peut être écartée».
Pétition
«Lorsque certaines affaires concernent le Pays Basque, la Corse, ou d'autres dossiers sensibles de ce genre, apparemment la justice n'arrive pas à fonctionner correctement», a constaté le président de la LDH. Il a rappelé que la ligue a été fondée il y a 112 ans, à l'occasion d'une affaire «aussi troublante» : l'affaire Dreyfus. Depuis, la LDH reste vigilante sur les dérives de la Justice, et constate : «la loi n'est pas la même pour tous».
J.P. Dubois a affirmé son engagement pour la diffusion d'une pétition demandant que la justice fasse son travail dans ce dossier. Elle sera disponible via Internet.
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